Comme on se retrouve

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Comme on se retrouve · Chère Stéphanie Boisset

L’époque où Stéphanie étudiait à Paris 8 était celle du début de l’effervescence générale autour de l’art sur Internet. Elle a par exemple entretenu une correspondance soutenue avec « Mouchette », petite fille éternellement âgée de treize ans, qu’elle a rencontrée en personne alors que son identité (Martine Neddam, on le sait à présent) était un des secrets les mieux gardés du web. L’anecdote est assez belle : Stéphanie était partie à Amsterdam pour une soirée où un homme faisait des dédicaces sous le nom de « Mouchette », mais elle n’y a pas cru et a identifié la véritable « Mouchette », comme Jeanne d’Arc, qui selon la légende, avait désigné sans hésitation le futur roi Charles VII, déguisé en simple courtisan. Toujours à cette période, Stéphanie a participé à des expositions et des actions collectives diverses, dans le domaine de l’art en ligne, par exemple dans le cadre de Free Manifesta. Je pense qu’elle a été la première, parmi mes étudiants, à s’engager si fortement dans ce domaine, et son site archivé (il n’est plus mis à jour mais elle le conserve), boisset.de, peut être décrit comme un ancêtre du blog, au sens de journal en ligne, voire d’extension de sa personne. Pour cette raison, Fred Forest lui avait d’ailleurs consacré deux pages de son livre Net.Art Identité (2008).

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Stéphanie est née en 1975. Elle a grandi dans le Médoc. Sa mère est allemande, ce qui lui a permis de bénéficier d’une double-nationalité qui se révélera sans doute utile administrativement par la suite. Après un baccalauréat littéraire et deux semestres de fac d’Allemand à Bordeaux, elle a eu envie de passer un CAP de photographie, mais aucune école n’a voulu l’accueillir, arguant que, étant bachelière, elle avait déjà un diplôme supérieur au CAP : tout juste majeure, et déjà sur-diplômée ! Elle a malgré tout préparé l’examen par correspondance, en une année, et a décroché son certificat d’aptitude professionnelle. Stéphanie est partie six mois en Australie où elle a découvert Internet, avant que l’on commence à en parler en France, sans en comprendre toute la portée : « je me souviens que la personne qui me montrait, m’a dit : regarde, c’est le vernissage à tel endroit à New York, et que ça m’avait laissé perplexe, je ne voyais pas l’intérêt de regarder un écran qui transmet des images saccadées… alors que la télé le faisait très bien ! ».
Elle a voulu poursuivre ses études dans une école supérieure de photographie à Cologne en « Fotoingenieurwesen », qui lui a semble un peu technique : beaucoup de chimie et de mathématiques. Elle s’est alors souvenue qu’un de ses profs de l’AFOMAV1 lui avait vanté l’université Paris 8 où, notamment, enseignait Dominique Baqué. Elle a préparé le dossier d’inscription depuis Cologne et y a commencé un cursus en arts plastiques en 1996. Elle a validé successivement son Deug et sa licence, puis une maîtrise, avec Maren Köpp, et, enfin, un DEA, en 2001, avec Liliane Terrier. Sur cette période, Stéphanie me rappelait que, tandis qu’elle finissait son mémoire, elle m’avait écrit à propos d’un programme que je l’avais aidé à écrire2, et je lui avais répondu en terminant mon mail par :« dis-donc, tu as allumé la télé ? C’est la 3e guerre mondiale là ». On était le onze septembre et, absorbée par son travail, Stéphanie n’avait allumé ni télévision ni radio, c’est par Internet, sa seule fenêtre sur le monde ce jour-là, qu’elle a eu la nouvelle.
L’époque où Stéphanie étudiait à Paris 8 était celle du début de l’effervescence générale autour de l’art sur Internet. Elle a par exemple entretenu une correspondance soutenue avec « Mouchette », petite fille éternellement âgée de treize ans, qu’elle a rencontrée en personne alors que son identité (Martine Neddam, on le sait à présent) était un des secrets les mieux gardés du web. L’anecdote est assez belle : Stéphanie était partie à Amsterdam pour une soirée où un homme faisait des dédicaces sous le nom de « Mouchette », mais elle n’y a pas cru et a identifié la véritable « Mouchette », comme Jeanne d’Arc, qui selon la légende, avait désigné sans hésitation le futur roi Charles VII, déguisé en simple courtisan. Toujours à cette période, Stéphanie a participé à des expositions et des actions collectives diverses, dans le domaine de l’art en ligne, par exemple dans le cadre de Free Manifesta. Je pense qu’elle a été la première, parmi mes étudiants, à s’engager si fortement dans ce domaine, et son site archivé (il n’est plus mis à jour mais elle le conserve), boisset.de, peut être décrit comme un ancêtre du blog, au sens de journal en ligne, voire d’extension de sa personne. Pour cette raison, Fred Forest lui avait d’ailleurs consacré deux pages de son livre Net.Art Identité (2008).

Au cours de ses études, pour des stages ou des emplois d’été, Stéphanie s’est régulièrement rendue à Berlin, où elle envisageait d’aller vivre. Elle ne l’a pas fait tout de suite. Tout en commençant une activité de freelance sous le régime de la Maison des Artistes (avec pour premier client La Périphérie), elle a commencé par travailler pour CreativTV, une « chaîne » de télévision en ligne consacrée à l’art contemporain, née longtemps avant Youtube ou Dailymotion, c’est à dire à une époque où mettre des vidéos sur le web était loin d’être facile : problèmes de formats, connexions haut-débit balbutiantes, et public assez réduit. Après un peu plus de deux ans, elle a quitté CreativTV pour partir à Berlin, où elle participe à une exposition collective et rencontre le groupe Public Art avec qui elle travaillera par la suite sur des projets culturels, comme par exemple The Mobile Studios. Elle profite d’abord d’un programme européen pour les demandeurs d’emploi et s’installe le 30 décembre 2004. Au terme de ce programme, elle s’installe pour de bon et rompt avec l’administration française, non sans difficultés : elle a eu du mal à se faire radier des ASSEDICS, qui ne comprenaient pas pourquoi elle renonçait sciemment aux onze mois de chômage qui lui étaient dus : « restez, des gens comme vous [des artistes], il en faut ! ». Elle a obtenu son quitus fiscal, ce qui n’a pas été si facile non plus puisque le Trésor public l’a avertie qu’elle serait bien plus fortement imposée en Allemagne qu’en France : « ça va vous coûter cher ! ».

Depuis treize ans, elle s’occupe de direction artistique pour les sites web de ses différents clients, qu’elle aide à définir leurs besoins, à qui elle propose des budgets et des maquettes. Elle a une idée précise du fonctionnement et des possibilités des langages informatiques mais délègue le développement sérieux à son ancien camarade de fac Blaise Bourgeois, à David Farine ou à une société arménienne, Toort. De ses années d’études en arts plastiques, Stéphanie retient une ouverture sur quantité de domaines divers, qui lui permet aujourd’hui de travailler en bonne intelligence avec des clients photographes, plasticiens ou architectes, mais aussi des petites entreprises. Elle manque de temps, mais pas d’envie, pour poursuivre une production plastique personnelle.

Son site actuel : stephanieboisset.net | Son ancien site : boisset.de | Ses travaux plastiques actuels : daybyday.stephanieboisset.net

  1. Le centre de formation qui a suivi la préparation de la partie pratique de son CAP. [?]
  2. L’œuvre en question était celle-ci, exposée dans le cadre de l’exposition collective Love me Love me, à La Périphérie. [?]

 



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