Créer à l’ère des médias numériques

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Net art – Créer à l’ère des médias numériques

Résumé: Le travail artistique à l’ère d’Internet associe la création d’œuvres interactives à la production de formes de communication et d’exposition visant à impliquer et fidéliser le public. Internet place en effet l’œuvre d’art au cœur d’une négociation distribuée entre artistes, informaticiens, dispositifs techniques et public enrôlé. Cet article analyse ces nouvelles figures artistiques et leurs modes relationnels dans un contexte où la mise en œuvre d’art devient indissociable de la pratique de médias évolutifs et poreux. À l’intersection des sciences de la communication, de la sociologie des usages et de l’innovation artistique, l’article met en perspective ces formes d’attachement au Net art, révélatrices de nouveaux régimes médiatiques.

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  • 1 Cet article prolonge les analyses et développe des résultats d’enquête d’un texte précédemment édit (…)
  • 2 Cf. dès 1995 [La lettre] d’Antoine Moreau (am@antoinemoreau.org),Pour infos/l’actualité du monde d (…)
  • 3 L’examen des modes de participation et des « opérations médiatiques » prises en charge par le publi (…)
  • 4 Sur le concept de « dispositif » et son application aux arts numériques, voir : Jacquinot-Delaunay (…)
  • 5 Voir le site de la galerie TELEPORTACIA (http://art.teleportacia.org/) à l’initiative d’Olia Lialin(…)

1Dans l’univers des médias, un engagement plus « expressiviste » se lit aujourd’hui à travers l’essor et la multiplication des dispositifs d’auto-production ou de production de soi que constituent les sites personnels, les blogs et leurs technologies appareillées (syndication et tags, podcasting, video-blogging…), ainsi que les réseaux sociaux d’échanges entre pairs et leurs pratiques associées (fansubbing, fansfilms…). Depuis la seconde moitié des années 1990, le Net artguide et préfigure ces technologies et usages médiatiques à travers la mise en abîme d’une ambivalence de la relation au réseau Internet, tantôt intime et terriblement solitaire, vécue comme un retrait du monde réel, tantôt plus collective et communautaire, à mesure que se développent de nouvelles interfaces de dialogue. Le Net art1 désigne désormais des créations interactives conçues parpour et avec le réseau Internet, par opposition aux formes d’art traditionnelles transférées sur des sites-galeries et autres musées virtuels. Pour les mondes de l’art, l’originalité d’Internet tient à ce qu’il propose simultanément un support, un outil et un environnement créatif. Il faut entendre par support, sa dimension de vecteur de transmission, dans le sens où Internet est son propre diffuseur ; par outil, sa fonction d’instrument de production, qui donne lieu à des usages et génère de nouveaux produits artistiques ; et par environnement, enfin, le fait qu’il constitue un espace « habitable » et habité. Dans ce contexte, le travail artistique vise au moins autant la conception de dispositifs interactifs que la configuration de situations communicationnelles. Utilisant toutes les fonctionnalités d’Internet – le web (l’html, le ftp, le peer to peer) mais aussi les réseaux sociaux, le courriel, le chat – le Net art promeut des œuvres dont les enjeux relationnels et collaboratifs ont grandement bousculé les relations entre art et société. Le site Internet, lahomepage, le blog, les mailings list ou les forums de discussion constituent désormais les cadres de sociabilités renouvelées2. Les développements récents du « Web 2.0 » introduisent de nouvelles formes d’attachement du public : capté et fidélisé dans des dispositifs sociotechniques qui l’impliquent plus directement et qui se nourrissent de sa participation3. En s’inscrivant dans cette articulation, « l’œuvre du Net art » se manifeste dans la conception de dispositifs4 interactifs, mais aussi dans la production de formes de vies en ligne, et de stratégies de communication en réseau. Le réseau Internet y est tout autant investi comme un atelier en ligne que comme un lieu d’exposition : c’est-à-dire comme l’espace de création, de communication et de réception active de la pratique artistique5.

2L’analyse approfondie du Net art met clairement en évidence ce glissement par lequel l’œuvre se trouve moins dans ce qui est donné à voir que dans le dispositif qui la fait exister. L’affichage sur l’écran n’étant que la face apparente de toute une infrastructure technique et informationnelle. Toute œuvre du Net art inclut en effet une avant-scène (l’interface médiatique), une scène composée de divers éléments qui viennent nourrir l’œuvre (textes, sons ou images) et des coulisses (où se nichent un programme et des applications informatiques). Ce constat et le recul analytique que nous offrent dix premières années d’expérimentation et de création pour le réseau Internet nous permettent aujourd’hui de distinguer trois principales formes du Net art : les œuvres de contamination médiatiques, les œuvres de génération algorithmiqueet les œuvres de communication interactive. Les premières sont principalement axées sur l’interface (médiatique) par laquelle transitent l’œuvre, l’usage et la communication ; les deuxièmes sont focalisées sur le programme(algorithmique) d’objets-animations ou d’objets-environnements exécutables ; les troisièmes sont centrées sur les contenus (interactifs) qui laissent ou non à l’internaute une possibilité d’apport ou de transformation. Les créations artistiques par et pour Internet visent donc autant la structure et l’architecture du média (les codes et programmes informatiques générés) que les formes communicationnelles et les contenus plastiques exposés. Les œuvres qui en résultent sont par conséquent multiformes – environnements navigables, programmes exécutables, formes altérables – et vont parfois jusqu’à inclure une possibilité d’apport ou de transformation du matériau artistique initial.

  • 6 Le concept de « carrière » des œuvres est d’abord à entendre au sens des interactionnistes (Becker(…)

3Cet article ne vise pas la description exhaustive de ces différentes figures (Fourmentraux 2010), mais propose à la fois un bilan et une esquisse des évolutions du Net art en soulignant deux tendances principales : le hacking créatif et l’esthétique des réseaux sociaux. Tout en s’inscrivant dans la filiation du Net art, les œuvres les plus récentes en radicalisent l’esprit et la forme par une mise en tension de l’innovation technologique et des pratiques culturelles et médiatiques qui en découlent. La carrière de l’œuvre d’art y est envisagée comme un produit dynamique, plutôt que comme un bien statique (Abbott 2001, Fabiani 2003), placée au cœur d’une négociation et reconfigurée par les multiples jeux d’acteurs qui s’en emparent6.

L’artiste hacker : Inventeur d’œuvres et d’applications socio-techniques

  • 7 Pour un premier manifeste du Net art « activiste » voir Joachim Blank : http://www.irational.org/ce(…)
  • 8 Le sens informatique de to hack into a data base renvoie à l’action de s’introduire en fraude dans (…)
  • 9 Cf. Jodi, Portail,http://www.Jodi.org –Jodi, OSS,http://www.oss.Jodi.org– Jodi, Error 404, http(…)

4L’investigation médiatique qui marqua les premières réalisations liées à Internet tend aujourd’hui à se radicaliser dans des formes renouvelées de création qui épousent les évolutions technologiques récentes. Une même détermination touche, au début de leur histoire, les médias photographique, cinématographique et vidéographique, tour à tour explorés, contournés et détournés par la pratique artistique expérimentale. Les premières pièces vidéo de Nam June Paik ou celles de Wolf Vostell se sont notamment attachées à détruire la télévision, physiquement (sculptures vidéo) autant que symboliquement, en intervenant à même la matière du médium par des altérations du signal vidéo. La télévision, le meuble lui-même, l’écran, le tube cathodique, le signal vidéo et son indéfinition, sa fébrilité et sa luminance étaient pris à la fois comme l’objet et le matériau de l’investigation artistique. Les pionniers du Net art ont souvent dénoncé la prégnance d’un langage quasi exclusif d’organisation des données hypertextuelles (HTML) qui contribuait, selon eux, à accentuer le caractère uniforme de la majorité des sites Web, dans leur agencement aussi bien que dans l’apparence de leurs interfaces. L’approche artistique proposait alors de contourner ces prescriptions d’emplois visant à discipliner les usages et parcours au sein des sites Web : les liens soulignés en bleu, les images cliquables, les zones title et body. Les Net artistes ont en effet proposé des voies alternatives à ces options strictement fonctionnelles telles que le pointer-cliquer comme convention de navigation, la distribution contrainte de l’information, sa réception figée, sans possibilité d’intervention ou de transformation. Un nombre grandissant d’artistes du réseau revendiquent ce type d’implication parasitaire7. Leur forme liminaire d’action créative vise à contaminer l’Internet par des virus artistiques qui empruntent à la logique et aux comportements déviants des pirates de l’informatique : les hackers8. Certains artistes mettent en effet en œuvre une efficace de l’infection et de la contamination : leur démarche a pour objet l’incident, le bug, l’inconfort technologique et la perte des repères. Les œuvres pionnières de Jodi9interviennent par exemple sur la structure du langage Html par altération du code et transformation des balises permettant l’agencement des sites web : tant au niveau de la mise en page que de l’intégration des composantes multimédias, du son, de l’image, de la vidéo. En opérant une intrusion à la racine même des sites, au niveau du langage et du code informatique, ces œuvres génèrent des erreurs basiques et des commandes contradictoires : l’erreur système 404qu’elles affichent fait ici figure de leitmotiv créatif. Jodi entraîne ainsi le public dans les dédales rhizomatiques d’un jeu de piste dont il est souvent impossible de trouver l’issue, leurs interfaces de brouillage confrontant le visiteur à l’apparition constante de messages d’alerte et engendrant une perte de contrôle de l’ordinateur qui ne répond plus à aucune commande.

  • 10 Cf. Mark Napier,Shredder,http://potatoland.org/shredder/welcome.Html– About the shredder,http:/ (…)

5Davantage centrés sur les coulisses de l’Internet, d’autres créateurs du Net art ont imaginé des navigateurs et des moteurs de recherche subversifs, dont leShredder10 de Mark Napier et Netomat de Maciej Winiewski sont des figures emblématiques. Ces œuvres s’approprient les données du Web par une l’altération du code Html avant son interprétation par les logiciels de navigation. Il s’agit d’anti-moteurs de recherche qui redonnent à l’Internet son potentiel d’archive dynamique et modulable. Le Netomat répond par exemple aux requêtes des internautes par un afflux de textes, de sons et d’images fixes ou animées récupérées sur le Web. Il revient alors à l’utilisateur de combiner ou de recombiner ces différentes informations sans se soucier de l’arborescence du site ou de la structure de la page d’où elles sont extraites. À la frontière entre le navigateur, le moteur de recherche et l’extracteur de données, cette œuvre propose une forme active d’accès et de recouvrement des informations sur Internet. Son programme – le Netomatic Markup Language – développé en open-source est lui-même modulaire et adaptable : il peut être approprié et amélioré par ses utilisateurs ou servir de plate-forme pour d’autres applications.

  • 11 À l’initiative du groupe LAN, mêlant des artistes et des professionnels du design. Cf. http://www.t (…)

6Le Trace Noiser11 défend également un mode de production artistique basé sur le développement en open-source d’applications et d’outils informatiques détournés de leurs usages. Ce générateur de clones informationnels croise les fonctionnalités du moteur de recherche et des outils statistiques d’indexation et de traçage des réseaux de liens sur le Net. L’œuvre génère de fausses pages perso et les dissémine sur le réseau pour brouiller l’identité des participants. L’internaute est invité à saisir dans le Trace noiser son identifiant (nom et prénom) à partir duquel sera créée sa propre page Web. Ce dispositif dessine en effet un portrait intime de l’internaute à partir du glanage et du réagencement alternatif des sources le concernant retrouvées sur le réseau. Le projet artistique exploite l’idée que toute personne active sur le Net laisse, parfois malgré elle, une quantité de traces numériques (les traces liées à l’indexation d’un nom dans des courriels, des formulaires de commande, des signatures électroniques, des déclarations d’usage de logiciels, etc.), lesquelles sont ensuite traitées et travaillées par le Trace Noizer (démultipliées et transposées dans d’autres contextes). L’application créative brouille les pistes, mêle le vrai au faux et rend de ce fait difficile d’apprécier cette (dés)information. Il en résulte une identité fragmentée qui place l’internaute dans l’entre deux algorithmique des traces informatiques glanées sur le Web et de celles générées par le Trace Noizer, continuellement découpées et altérées dans leur affichage et leur organisation.

  • 12 Cf. http://www.rhizome.org/carnivore crée par le RSG : un collectif international qui associe infor (…)
  • 13 Cf. Josh On de Futurefarmers, Anti-wargame :http://www.antiwargame.org.(…)
  • 14 Cf. Heath Bunting,http://www.irational.org.(…)
  • 15 Cf. RTMARK,http://www.rtmark.comet The YES MEN –http://www.theyesmen.org(…)
  • 16 Cf. Pavu, http://www.pavu.com.(…)
  • 17 Cf. Etoy Corporation, http://www.etoy.com.(…)

7Cette première série d’œuvres Net art révèle les implications sociales des technologies de repérage et d’accès à l’information sur Internet. Les browsers y apparaissent comme des organes de perception au travers desquels nous voyons le Web : ils filtrent et organisent les informations dispersées sur un nombre exponentiel d’ordinateurs dans le monde. D’autres dispositifs de distorsion des contenus et des outils de l’Internet adoptent une visée plus politique. L’œuvre collective12 Carnivore, promue au festival Ars Electronica, est une version détournée du logiciel DCS1000 employé par le FBI pour développer l’écoute électronique sur le réseau. Josh On de Futurefarmers propose une version anti-impérialiste des jeux vidéo ayant pour mission la guerre contre le terrorisme13. Heath Bunting14 pervertit les communications médiatiques de grandes puissances financières. Le collectif américain RTMARK15 détourne les stratégies de communication de grandes sociétés de courtage privées. Le collectif français PAVU16 transporte et parodie la logique économique des sociétés d’audit et de conseils, dans la sphère artistique et culturelle de l’Internet. Ils initient des objets informationnels résultant du forage de données préexistantes prélevées sur le réseau (plining), à partir desquels est créée une monnaie d’échange (le gnou) et un système de valorisation financière apparié à la transaction des œuvres. Enfin, le collectif européen ETOY17 mène de nombreuses actions au cœur de la bataille politique et économique des noms de domaines sur Internet (DNS, Dot.com), inaugurant de la sorte une guerre informationnelle sur le terrain de l’e-business et des nouvelles valeurs financières comme le NASDAQ.

  • 18 À l’ère du Web 2.0 voir Christophe Bruno http://www.christo-phebruno.com/. Proche du Trace noizer(…)

8À l’heure de l’Internet 2.0, l’artiste Français Christophe Bruno incarne le renouveau de cette figure de l’artiste parasite en « s’attaquant » aux outils et rituels du web collaboratif. Il baptise une première série d’œuvre les « Google Hack » : des dispositifs artistiques et programmes informatiques qui détournent Google de ses fonctions utilitaires tout en en révélant les dimensions contraignantes et cachées. Selon l’artiste, Internet est devenu un outil de surveillance et de contrôle inégalé dont la dynamique économique repose sur l’analyse et la prédiction de tendances, à l’aide de logiciels de traçage de la vie privée des goûts et des identités sur la toile. Pour révéler ces déterminismes, il intitule Human Browser, le Navigateur Humain une série de performances Internet sans-fil (Wi-Fi) dans l’espace physique. Grâce à son casque audio, un comédien entend une voix de synthèse qui lit un flux textuel provenant de l’Internet en temps réel. Le comédien interprète le texte qu’il entend. Ce flux textuel est capté par un programme (installé sur un portable Wi-Fi) qui détourne Google de ses fonctions utilitaires. En fonction du contexte dans lequel se trouve l’acteur, des mots-clés sont envoyés au programme (grâce à un PDA Wi-Fi) et utilisés comme input dans Google, de sorte que le flux textuel est toujours lié au contexte. Pendant la manifestation SIANA 07 (Semaine Internationale des Arts Numériques et Alternatifs), du 15 au 17 mars 2007 à Evry (France), il présente WiFi-SM. Ce dispositif invite le spectateur-acteur à partager la douleur du monde : un patch WiFi-SM, placé sur le corps du volontaire, va rechercher sur Google des mots programmés évoquant le mal, la souffrance : « meurtre », « viol », « virus » parmi 4 500 sources d’information dans le monde. À chaque mot-clef rencontré, le spectateur ressent une légère décharge électrique, en sympathie avec la souffrance globale. Grâce à cette « technologie P2P (Pain to Pain) », l’artiste parodie la publicité et propose en argumentaire de vente : « faites baisser votre niveau de culpabilité »18.

  • 19 On doit ici distinguer le mouvement du logiciel libre, Free Software Foundation, fondé par Richard (…)
  • 20 “In the art world, a work of art is called an « art piece ». The word « piece » designates a thing (…)
  • 21 Voir par exemple surhttp://runme.org : Eldar Karhalev & Ivan Khimin, Screen Saver, 2001,http://ru (…)

9De nombreux artistes du Net art accompagnent aussi depuis l’origine d’Internet le mouvement du logiciel libre en créant des œuvres inspirées du modèle « copyleft » de développement à code ouvert (open source19). L’Art Bit Collection20 de l’International Computer Consortium de Tokyo (ICC) ou le site runme.org21 regroupe des travaux qui explorent en cette direction les recherches du Net art : ils rassemblent principalement des expérimentations autour des langages de programmation, des environnements logiciels, desNetwork community, des applicatifs de visualisation des coulisses du World Wide Web, et enfin, des applications détournées de logiciels interactifs. Ces dispositifs sont davantage axés sur les applications informatiques à l’usage des internautes, appelées aussi les logiciels auteurs.

Internautes à l’œuvre : réseaux sociaux et « médias praticables »

  • 22 Cf. The Centre of Attention, E-mail Art, du 12 août au 16 septembre 2002, Londres http://www.thecen (…)
  • 23 Cf. Mouchettehttp://www.mouchette.org(…)
  • 24 Voir Jenni, JenniCam, http://www.jennicam.org, Voog, Anna Clara,Anacamhttp://www.anacam.com et Me (…)
  • 25 Cf. Durieu & Birgé :Le ciel est bleu,http://www.lecielestbleu.com/ (2002) ; Clauss & Birgé :Inte (…)
  • 26 Cf. Grégory Chatonsky, Sur Terre,http://www.arte.tv/fr/cinema-fiction/Sur-Terre/, voir aussi Peter (…)
  • 27 Cf. Chaos Computer Club, Blikenlights, www.blinkenlights.de/arcade/games.fr.html. Voir aussi, les p (…)

10Si l’emploi des technologies numériques renforce, au cœur des productions artistiques contemporaines, la prédominance du régime conceptuel et des différents registres de l’écriture artistique de l’idée, du code et du programme informatique, il promeut simultanément une réhabilitation de l’image et de l’échange communicationnel. Poursuivant la logique plus ancienne du Mail art (ou de l’Art postal), les premières œuvres pour le réseau Internet ont tout d’abord promu une circulation d’e-mails artistiques. La galerie londonienne The Centre of Attention22 a consacré ce type d’action en invitant des artistes à produire des happenings informationnels par propagation et contamination des messageries électroniques. La lettre électronique, à mi-chemin de la performance d’artiste et de l’acte de langage, constituait une « communication d’auteur », participative et performative, dont la propagation a adopté les modes d’amplifications propres à la « rumeur ». Mouchette23 a ainsi érigé en œuvre artistique le jeu des mises en lien, l’esthétique relationnelle et le réseau où se déploie l’e-mail. À l’instar de Mouchette, de nombreux projets Net art adoptent la forme d’un récit imagé et évolutif proche du journal personnel et intime, mais désormais éditorialisé, donné à voir et à vivre en quasi direct sur le Web. Ils déclinent en ligne les potentialités d’une archive visuelle et textuelle qu’il est possible d’afficher et d’entretenir sur le long terme, en ayant ou non recours à la participation des visiteurs. Dans ces projets, la forme de l’image-récit empruntée au régime cinématographique devient le lieu d’une action ludique et d’un environnement de communication24. À l’interface du cinéma interactif, des jeux vidéos et de l’Internet, un nombre croissant d’artistes proposent alors de renouveler les mises en scène et les modes de relations aux images : l’image y est en effet actée (Barboza, Weissberg 2007) et se donne désormais autant à voir qu’à performer. L’interactivité proposée consiste en une possibilité d’intervention sur la séquence et le déroulement de scénettes ou de micro-récits dynamiques qui réagissent en temps réel aux actions des visiteurs. Certaines images « en puissance » deviennent le théâtre d’opérations distribuées entre l’artiste, le programme et le public. C’est le cas notamment de dispositifs portés par des duos artistes/informaticiens25 qui expérimentent une forme de cinéma interactif pour Internet, dans lesquels l’interactivité donne au public la possibilité d’altérer la linéarité du film26. D’autres projets créatifs du Net art s’attachent à l’invention de nouvelles modalités de co-création d’une image collective. À l’instar du dispositif pionnier de l’artiste ingénieur Olivier Auber, le Générateur Poïétique, ces œuvres consignent aux évolutions récentes des technologies de la mobilité (téléphone portable, palm pilot, GPS, etc.) des nouveaux scénarios d’usage. Dans l’espace urbain, par exemple, les artistes créent des installations qui reposent sur l’intervention du public comme lors de la Nuit Blanche courant octobre 2004 à Paris, où il était possible de jouer au Tetris sur la façade de la Bibliothèque Nationale de France. La tour T2 ayant été transformée en un écran géant (20×36 pixels sur une surface de 3 370 m2) utilisant l’éclairage des fenêtres. Les appels téléphoniques et l’envoi de SMS avaient un impact créatif sur l’éclairage lumineux de la façade27.

  • 28 Douglas Édric Stanley,Concrescence –www.abstractmachine.net, 2000-2005. (…)

11Le Net art tend également à s’inscrire dans des objets physiques. À l’instar des recherches artistiques de Douglas Edric Stanley qui explorent depuis de nombreuses années les formes expérimentales d’un cinéma transformé, qu’il qualifie de cinéma interactif, génératif ou algorithmique. Sa pièce majeure –Concrescence28 – questionne les possibilités de narration et les modes d’expérience propres à l’image programmée. Ce dispositif articule un logiciel de narration interactive et générative et un dispositif physique d’interaction avec l’image. Il s’agit d’une hypertable qui, en défiant les lois de la projection cinématographique, propose un écran horizontal sur lequel le public peut manipuler et expérimenter différents récits et images. Selon l’artiste, « le choix des images, c’est-à-dire la narration, vient de l’interaction entre la main (du regardeur) et le programme ». Même sans interaction, le programme de vie artificiel fait apparaître et disparaître les images selon des règles comportementales qui réagissent aux manipulations du public. « Cette indépendance des deux systèmes de vie – de la main du manipulateur et du système de vie artificielle qui pousse autour – permet d’assurer l’histoire devant n’importe quel type d’interaction ».

  • 29 Dans un sens proche du concept informatique de « réalité augmentée » : un système qui rend possible(…)

12L’image n’est point ici une finalité en elle-même, elle incarne davantage un lien, une interface qui affiche sur l’écran la structure langagière, visibilise le programme, en même temps qu’elle relie l’auteur et le public. Hybridant les formes de mise en récits propres au cinéma et la « jouabilité » introduite par le jeu vidéo, elle gagne en interactivité et promeut des expérimentations artistiques et des pratiques de réception renouvelées. Le régime « virtuel » et « fragmenté », hérité de l’informatique, redéfinit les attributs de l’« image », ses modes de circulation ou de mise en récit. L’image n’est plus mise au service d’un récit linéaire ou d’une représentation fixée. Elle joue le rôle d’une interface mobilisée pour concevoir, véhiculer et agir une œuvre dont la carrière idéale suppose précisément que certains de ses fragments puissent demeurer potentiels ou « à faire » (Souriau 1956). En ce sens, l’image se trouve prise entre une représentation de l’œuvre conçue par l’auteur et un contexte de lecture pour ses visiteurs. Autrement dit, l’image numérique en ressort appareillée et augmentée d’une dimension opératoire29.

13La spécificité du Net art et de ses évolutions récentes réside aujourd’hui dans cette conjugaison d’une configuration technique et d’une occasion sociale ritualisée. L’implication du public constitue ici un impératif renouvelé. Elle est mise en scène dans des dispositifs informatiques qui génèrent différents modèles d’interactivité. Elle fait l’objet de stratégies artistiques de fidélisation et repose sur la construction de « prises » pour le public. Elle engendre, enfin, divers « contrats » et « rituels » de réception propre à cette forme d’art. Par conséquent, les œuvres qui en découlent sont dialogiques, dans le sens où elles aménagent une réception négociée avec le public. Partagées entre artistes, ingénieurs et publics internautes, elles matérialisent des facteurs de contraintes autant qu’elles génèrent des appropriations, interprétations et actions médiatiques. Il en résulte une situation collective d’énonciation et d’opération qui n’est plus mise au service d’un résultat unique, mais se trouve encastrée dans un processus évolutif et incrémental dans lequel des acteurs multiples investissent, individuellement et collectivement, une œuvre qui reste pour partie à faire et à refaire.

14Ces dispositifs conduisent à ne plus séparer producteurs et destinataires, contraintes et ressources. Leur caractère performatif ouvre de nouveaux espaces de jeu et de négociation. Si la polysémie du concept de dispositif a abondamment nourri le Net art – de Michel Foucault à Roland Barthes, de la science des signes (sémiotique) aux nouvelles théories de l’information et de la communication – on tend aujourd’hui vers la mise en perspective du caractère actif, et surtout, sociotechnique, de tout dispositif. Michel Foucault (1975) en a souligné l’ambivalence : en insistant sur le déterminisme des dispositifs de surveillance, tel que le panoptique disciplinaire, mais qui ne valent que par l’action de leurs sujets, une action nécessaire à leurs actualisations. Selon Giorgio Agamben (2007), la ruse du dispositif est en effet qu’il fonctionne en accord avec la « subjectivation » qu’il produit lui-même, et donc avec l’accord implicite du sujet, pour lequel la « profanation » du dispositif est toujours possible. Marshall McLuhan (1968) ou Roland Barthes (1984) ont également souligné cette intrication du dispositif, entre cadre et action, sur le terrain de l’expérience médiatique. De ce point de vue, le concept de dispositif est voisin d’autres notions avec lesquelles il conjugue une vision délibérément pragmatique du social et de la technique : empruntant aux concepts d’attachement, de configuration ou d’agencement et de mise en œuvre. Il s’agit alors d’éclairer l’action de ceux qui conçoivent là où se joue la médiation, non pas avec, mais dans l’environnement technique, poursuivant en cela la direction de recherche initiée par la sociologie de la médiation d’Antoine Hennion (2007).

15Cette configuration des dispositifs Net art engage une redéfinition des conventions qui organisent et permettent la circulation, aussi bien que la réception des œuvres d’art. Dans ce contexte, l’œuvre n’est plus donnée d’emblée, mais résulte d’un processus engageant les modalités de son exploration et de son actualisation. En proposant un environnement à la fois technique et expérimental, les médias praticables font donc du public un acteur clé de l’opération : ils permettent d’ajuster le « faire-faire » des médias et l’activité du public dans le sens d’une expérience distribuée. Car si les médias praticables peuvent s’apparenter à une partition et proposer un mode de lecture des médias, leur mise en pratique doit être co-construite, traduite et négociée avec le public. Si on élargit cette analyse à l’ensemble des médias interactifs – que préfigure largement la prospective artistique – leur manifestation dépend littéralement de leur pratique, envisagée désormais de manière dynamique, comme une intense activité, qui fait du public des amateurs, davantage experts, informés et instrumentés. Ni véritablement rationnel, ni rédhibitoirement déterminé, le public doit développer à son tour des « prises » sur les médias, qu’il pourra selon les cas « déjouer » ou rejouer : ces derniers ne sont visibles qu’actualisés ou au mieux « performés ». En ce sens, tous les médias praticables reposent sur une primauté de la manipulation : ils n’existent pas sans un important travail créatif, intellectuel et technique, de la main et de ses prolongements à l’écran (pointeurs de souris, curseurs, etc.). Le public devient le point de fuite de ces dispositifs : il est ce par quoi les médias praticables tiennent leur rapport à l’extérieur.

16Sous tension, pris entre modes de représentation et modes opératoires, le Net art implique autant les objets et la technique que les sujets qui expérimentent, utilisent, détournent, s’approprient, jouent avec les dispositifs ou sont pris par eux. En évitant de figer des rôles et des positions a priori, il permet d’appréhender conjointement les configurations techniques et les relations sociales qui forment les conditions d’une mise en œuvre partagée entre éléments matériels et humains. Comme le disait Madeleine Akrich (1993), « l’action avec un dispositif technique ne peut être rabattue ni sur l’intention, ni sur la prescription et c’est dans l’espace laissé entre ces deux termes que peut se loger l’acteur-utilisateur ». Par-delà l’opposition traditionnelle de la grande culture et des médias de masses, le Net art conjugue ainsi la pratique médiatique et l’expérience esthétique de nouveaux dispositifs de création : jeux vidéos, cinéma praticable, installations numériques et interactives. Le Net art réinscrit ainsi l’idée de dispositif dans une visée pragmatique de la création artistique qui articule à une configuration ou à un agencement technique, la mise en œuvre d’une forme renouvelée d’attachement aux médias.

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STANLEY D.E., (1988) Essais d’interactivité. Hypothèses, analyses et expériences, Université Paris 8. Mémoire de DEA. Laboratoire d’Esthétique de l’interactivité, Paris.

Annexe

Petit lexique de l’Internet participatif et du « Web 2.0 »

Blog : contraction de Web et Log (les journaux de bord de la marine et de l’aviation américaines), le blog est un journal en ligne permettant l’échange de points de vue.

Blogosphère : désigne l’ensemble de la communauté qui anime des blogs. Elle est généralement tissée d’une multitude de liens croisés, ou blogroll.

Crowdsourcing : en français, traitement par la foule. Consiste, pour les éditeurs de sites, à utiliser les internautes pour créer des contenus, répondre aux questions d’autres visiteurs, voire participer à la conception du site, d’un produit ou d’un service.

Flux (ou fils) rss ou Atom : formats populaires de syndication de contenus Web. Après s’être abonné à un flux sur un site, l’internaute reçoit les mises à jour de ce site automatiquement sur son ordinateur.

Folksonomy : contraction des mots folks (potes) et taxonomy (en français, la science du classement). Méthode de classification collaborative de contenus Web, via des tags, réalisée par une communauté d’internautes.

Podcasting : moyen de diffusion de fichiers audiovisuels (podcasts) sur le Net. Le podcast, une fois publié en ligne, est téléchargé automatiquement et transféré, via un fil rss, vers un ordinateur ou un baladeur numérique.

Social bookmarking : partage de favoris ou de signets, en français, par leur enregistrement puis leur repérage par des tags sur un site Web public.

Syndication : consiste à intégrer sur un site, de manière automatique, tout ou partie du contenu d’un autre site. Ce procédé repose sur l’usage de fils rss ou Atom, deux formats de flux d’information auxquels les sites et les particuliers s’abonnent.

Tags : en français, étiquettes ou mots-clés. Proposés par le producteur de contenu, ils permettent de repérer et d’identifier des contenus dans la base de données.

Wiki : outil de gestion collaboratif de site Web qui permet aux internautes de rédiger et de modifier librement des contenus.

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Notes

1 Cet article prolonge les analyses et développe des résultats d’enquête d’un texte précédemment édité : Fourmentraux J.-P. 2011 « Net art », Communications, n° 88, spécial 50 ans « Cultures du numérique », pp. 113-120.

2 Cf. dès 1995 [La lettre] d’Antoine Moreau (am@antoinemoreau.org), Pour infos/l’actualité du monde de l’art de Xavier Cahen (cahen.x@levels9.com), Olala Paris, de Georges Victor (Antoine Schmitt) (olalaParis@ml.free.fr), Nettime.fr, de Nathalie Magnan (natmagnan@altern.org) (nettime-fr@samizdat.net), Rhizome(netartnews@rhizome.org). Et depuis 1997 Leonardo on line sur le site du Massachusetts Institute of Technology (MIT), Archée http://archee.qc.ca/ au Canada, Synesthésie http://www.synesthesie.com/, Panoplie www.panoplie.org en France.

3 L’examen des modes de participation et des « opérations médiatiques » prises en charge par le public est la perspective de recherche sociologique et communicationnelle que j’ai récemment pu adopter avec le soutien de l’Agence Nationale de Recherche (ANR) et du projet « PRATICABLES – Dispositifs artistiques : les mises en œuvre du spectateur » (DALMES, 2009-2011). Dans le prolongement de recherches qui se sont donné pour objet d’étude l’articulation des faits techniques et sociaux, non sur le mode de l’instrumentation ou de l’aliénation, mais sur celui de la fréquentation et du contact, voire du jeu : Souriau, 1956 ; Eco, 1965 ; Dodier, 1995 ; Latour, 2005 ; Akrich, Callon, Latour, 2006.

4 Sur le concept de « dispositif » et son application aux arts numériques, voir : Jacquinot-Delaunay et Monnoyer, 2009 ; Agamben, 2007 ; Duguet 2002, Boissier 2004, Stanley 1998, Fourmentraux 2005.

5 Voir le site de la galerie TELEPORTACIA (http://art.teleportacia.org/) à l’initiative d’Olia Lialina, 1998. Voir aussi les web-ateliers en ligne créés entre 1995 et aujourd’hui par Mathieu Laurette http://www.laurette.net/, Valéry Grancherhttp://www.nomemory.org/, Fred Forest http://www.fredforest.com/, Antoine Schmitt www.fdn.fr/~aschmitt/gratin//as/index.html, Claude Closkyhttp://closky.online.fr/.

6 Le concept de « carrière » des œuvres est d’abord à entendre au sens des interactionnistes (Becker 1986, 1988) mais au moins autant au sens qui lui a plus tard été donné par l’anthropologie économique, davantage centrée sur les objets, saisis à travers leurs systèmes de qualification et de valorisation successifs (Appadurai 1986, Kopytoff 1986).

7 Pour un premier manifeste du Net art « activiste » voir Joachim Blank :http://www.irational.org/cern/Netart.txt.

8 Le sens informatique de to hack into a data base renvoie à l’action de s’introduire en fraude dans une base de données : il génère les termes hacking(piratage) et hacker (pirate informatique). Pour un premier manifeste du Net art « hacktiviste » voir Joachim Blank : http://www.irational.org/cern/Netart.txt.

9 Cf. Jodi, Portail, http://www.Jodi.org – Jodi, OSS, http://www.oss.Jodi.org – Jodi, Error 404, http://www.404.Jodi.org.

10 Cf. Mark Napier, Shredderhttp://potatoland.org/shredder/welcome.Html –About the shredderhttp://potatoland.org/shredder/about.Html. Voir aussi le dispositif du groupe londonien IOD (Mathew Fuller, Colin Green et Simon Pope) : un programme de reconfiguration de l’information permettant d’explorer et d’utiliser le Web à un niveau structurel : le Webstalker, http://www.backspace.org/iod.

11 À l’initiative du groupe LAN, mêlant des artistes et des professionnels du design. Cf. http://www.tracenoizer.org/ : Disinformation on demand.

12 Cf. http://www.rhizome.org/carnivore crée par le RSG : un collectif international qui associe informaticiens et artistes.

13 Cf. Josh On de Futurefarmers, Anti-wargame : http://www.antiwargame.org.

14 Cf. Heath Bunting, http://www.irational.org.

15 Cf. RTMARK, http://www.rtmark.com et The YES MEN –http://www.theyesmen.org

16 Cf. Pavu, http://www.pavu.com.

17 Cf. Etoy Corporation, http://www.etoy.com.

18 À l’ère du Web 2.0 voir Christophe Bruno http://www.christo-phebruno.com/. Proche du Trace noizer, l’œuvre Dreamlogs http://www.iterature.com/dreamlogsparodie le règne de l’autoédition en générant des blogs à l’insu des internautes à partir de leurs recherches et navigation sur Google. Dans Human Browser, un être humain incarne le World Wide Web (2001-2006) http://www.iterature.com/human-browser/fr/index.php, 1er Prix du Share Festival http://www.toshare.it, Turin – Jan 23-28, 2007. Voir aussi WIFI SM, Feel the Global pain,http://www.unbehagen.com/wifism-for-real, 2007. Pour un autre exemple de détournement d’une application Web (Flickr) voir Mario Klingemann, Flickeur, Royaume-Uni, 2006, http://incubator.quasimondo.com/flash/flickeur.php.

19 On doit ici distinguer le mouvement du logiciel libre, Free Software Foundation, fondé par Richard Stallman, et le mouvement Open Source Initiative, initié par Eric S. Raymond qui, s’ils coïncident sur la méthodologie des logiciels, diffèrent sur l’éthique de leurs mouvements, le premier se voulant être également un mouvement social. Cf. Eric S. Raymond, Comment devenir un Hacker,http://www.erwanhome.org/web/hacker.php#principe1.

20 “In the art world, a work of art is called an « art piece ». The word « piece » designates a thing that actually exists, but since software creations exist only as binary data, calling them an “art piece” seems wrong. Substituting “bit” for “piece,” we have decided to call such a work an « art bit »”. Manifeste de l’exposition « art.bit collection », June 21 – August 11, 2002 @ ICC.

21 Voir par exemple sur http://runme.org : Eldar Karhalev & Ivan Khimin, Screen Saver, 2001, http://runme.org/project/+screensaver/, Radical Software Group, Carnivore, 2001, http://r-s-g.org/carnivore/, Adrian Ward/Signwave, Auto-Illustrator/Autoshop, 2001/2002, http://www.auto-illustrator.com, Alex Mclean, forkbomb.pl, 2002, http://runme.org/project/+forkbomb/, Amy Alexander, Scream, 2005, http://scream.deprogramming.us/.

22 Cf. The Centre of Attention, E-mail Art, du 12 août au 16 septembre 2002, Londres http://www.thecentreofattention.org.

23 Cf. Mouchette http://www.mouchette.org

24 Voir Jenni, JenniCamhttp://www.jennicam.org, Voog, Anna Clara, Anacamhttp://www.anacam.com et Merritt, Natacha. Digital diaries http://www.digital-diaries.com, Agnès de Cayeux, In my room, www.agnesdecayeux.fr.

25 Cf. Durieu & Birgé : Le ciel est bleu, http://www.lecielestbleu.com/ (2002) ; Clauss & Birgé : Interactif Cinéma – Dervish Flowers, Flying Puppet :http://www.flyingpuppet.com/ (2003).

26 Cf. Grégory Chatonsky, Sur Terre, http://www.arte.tv/fr/cinema-fiction/Sur-Terre/, voir aussi Peter Horvath, Triptych : Motion Stillness Resistance, Canada, 2006, http://www.6168.org/triptych/index.html ou Martin Le Chevallier –http://martinlechevallier.free.fr

27 Cf. Chaos Computer Club, Blikenlights,www.blinkenlights.de/arcade/games.fr.html. Voir aussi, les projets de l’obx.lab (Jason Lewis et son équipe) http://obxlabs.hexagram.ca/index.php ou du Graffiti Research Lab (GRL), http://graffitiresearchlab.com/.

28 Douglas Édric Stanley, Concrescence – www.abstractmachine.net, 2000-2005.

29 Dans un sens proche du concept informatique de « réalité augmentée » : un système qui rend possible de superposer en temps réel l’image d’un modèle virtuel3D ou 2D, sur une image de la réalité qui devient ainsi manipulable. Pour un panorama des nouvelles figures de l’image 2.0, voir notamment INCIDENTwww.incident.net (depuis 1994), Maurice Benayoun www.benayoun.com (depuis 1995), Samuel Bianchini http://www.dispotheque.org/ (depuis 1999), Grégory Chatonsky http://gregory.incident.net/ (depuis 1994), Reynald Drouhinhttp://reynald.incident.net/ (depuis 1994), Anonymes http://www.anonymes.net(2002), Douglas Edric Stanley www.abstractmachine.net (depuis 2000).

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Pour citer cet article

Référence électronique

Jean-Paul Fourmentraux, « Net art – Créer à l’ère des médias numériques », Revue française des sciences de l’information et de la communication [En ligne], 1 | 2012, mis en ligne le 01 septembre 2012, consulté le 03 décembre 2012. URL : http://rfsic.revues.org/179

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Auteur

Jean-Paul Fourmentraux

Jean-Paul Fourmentraux est Maître de Conférences à l’Université de Lille 3, UFR Arts et Culture. Il est chercheur associé au Centre d’Études Sociologiques et Politiques Raymond Aron, École des Hautes Études en Sciences Sociales de Paris (EHESS). Il mène aujourd’hui des recherches comparatives sur les interfaces entre création artistique, recherche technologique et innovation sociale. Il est notamment l’auteur de Art et Internet. Les nouvelles figures de la création aux CNRS Éditions, Paris (nouvelle édition en 2010) et de Artistes de laboratoire. Recherche et création à l’ère numérique, Hermann, Paris, 2011. Page Web : http://lodel.ehess.fr/cespra/document.php?id=1188, Mail : jean-paul.fourmentraux@univ-lille3.fr



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